ALAIN RESNAIS
EN BREF :

Alain Resnais oeuvre dans le cinéma en tant que
réalisateur (bien qu'il ait débuté en tant que monteur). Il a plus d'une trentaine de films à son actif, tous plus originaux les uns que les autres. Ce grand monsieur a tourné son premier long-métrage en 1958 (sorti en 1959) sur un scénario de Marguerite Duras : Hiroshima mon amour . Le film a provoqué une secousse quasi-sismique dans le monde du cinéma en présentant un traitement nouveau des personnages et de la narration. Les films qui ont suivi ( L'Année dernière à Marienbad , Muriel ou le Temps d'un retour , etc.) ont achevé de classer son cinéma dans le genre "intellectuel". Aujourd'hui, Alain Resnais s'est davantage tourné vers un cinéma de comédie (mais ses comédies mêlent toujours un goût amer à ce qui nous semble uniquement sucré) avec notamment Smoking / No Smoking qui a obtenu sept César en 1994, On connaît la chanson qui en a obtenu sept en 1998 ou encore Pas sur la bouche , opérette de Maurice Yvain. Le dernier opus, Coeurs, sorti en novembre 2006, à la tonalité plus grave, a permis à Resnais de remporter le prix du meilleur réalisateur au festival de Venise. Ses films sont un vrai régal pour tout vrai gourmet cinématographique qui se respecte. La surprise est toujours au rendez-vous. Alors à quand le prochain monsieur Resnais ?
ELEMENTS BIOGRAPHIQUES :

Alain Resnais est né à Vannes (dans le Morbihan, en Bretagne) le 3 juin 1922. Il s'est très tôt intéressé à l'art cinématographique puisqu'à quatorze ans, il tournait déjà des petits films en 8 mm. Il lisait également beaucoup de bande dessinée (comme Mandrake le magicien, Le roi de l'or ou Les Aventures de Harry Dickson ), mais s'intéressait relativement peu au théâtre qu'il découvrit plus tard avec passion lorsqu'il s'installa sur Paris et qui inflença de plus en plus son travail au fil des années. Alain Resnais a d'abord commencé par prendre des cours de comédie (au cours Simon) qui ne s'avérèrent - selon lui - pas fructueux. Il pense alors à devenir libraire. Mais fasciné par le monde du spectacle et apprenant l'ouverture à Paris d'une école de cinéma, l'IDHEC , il décide de s'y inscrire dans la section "montage" en 1943. Il en ressort premier de sa promotion. Après avoir fait de la figuration dans le film de Marcel Carné Les Visiteurs du soir (1942), il tourne lui-même plusieurs courts-métrages (aujourd'hui quasiment introuvables) dont une série de portraits de peintres. Sa filmographie dite "officielle" commence en 1948 avec un court-métrage intitulé Van Gogh et qui met en scène la vie du peintre à travers ses propres peintures. Suivent alors différents courts-métrages empruntant également une forme documentaire, dont le plus célèbre reste Nuit et Brouillard (1955), présentation dénonciatrice de l'univers concentrationnaire : sur un texte de l'auteur Jean Cayrol (qui a lui-même (sur)vécu en camp de concentration), des images en noir en blanc témoignent de l'horreur des camps, tandis qu'en parallèle, des images en couleur montrent ce qu'il en reste une dizaine d'années plus tard. Le tout appelle au souvenir pour que ce cauchemar ne refasse pas son apparition.

Après le succès de ce court-métrage, les productions Argos Films demandent au metteur en scène de réaliser un film documentaire sur le bombardement atomique d'Hiroshima. Alain Resnais ne peut traiter ce sujet déjà plusieurs fois mis en scène sous une forme documentaire. Après avoir proposé à Françoise Sagan de lui écrire un scénario fictionnel sur ce sujet (celle-ci a refusé, ne s'en sentant pas capable), il s'adresse à
Marguerite Duras avec qui la collaboration sera minutieuse et très fructueuse. En naîtra alors Hiroshima mon amour (1959), le premier long-métrage d'Alain Resnais qui secoua vivement le monde cinématographique par ses formes nouvelles et audacieuses. Suivra alors un film non moins resté célèbre dans l'histoire du cinéma, L'Année dernière à Marienbad. Alain Resnais a alors choisi de travailler avec Alain Robbe-Grillet à qui il confie la rédaction du scénario. Le film perd ses spectateurs dans ses labyrinthes, les hypnotise, les surprend. Il obtient le Lion d'or à la Mostra de Venise en 1961 et fait extrêmement parler de lui dans les milieux étudiants notamment.

Suit alors
Muriel ou le Temps d'un retour (1963), film dont le scénario a été rédigé par Jean Cayrol et qui traite, de façon fictionnelle et sur un montage caractérisé par la fracture, de la guerre d'Algérie et de ses conséquences sur la psychologie des jeunes soldats. Avec la Guerre est finie en 1966, Alain Resnais confie la rédaction d'un scénario à Jorge Semprun sur le thème de la guerre d'Espagne. On classe alors le réalisateur dans la catégorie des "cinéastes engagés".

Pourtant, Resnais surprend et sort, en pleine crise de mai 68, un film entièrement fictionnel et fantastique,
Je t'aime je t'aime , avec Claude Rich. Le film devait être présenté au festival de Cannes, mais à cause des événements révolutionnaires, il ne l'a pas été et ne fut projeté au sein du célèbre festival qu'en mai 2002.

Alain Resnais est très discret sur sa vie privée. Sa biographie rejoint beaucoup sa filmographie comme vous pouvez le constater. Mais signalons toutefois que l'homme épousa en 1969 Florence Malraux, fille d'André Malraux, qui travaille dans le cinéma en tant qu'assistante (notamment avec son mari jusqu'en 1986).

En 1974, Resnais réalise
Staviky..., un film avec Jean-Paul Belmondo sur un nouveau scénario de Jorge Semprun qui met en scène les derniers moments de la vie du personnage sans entrer véritablement dans l'affaire politique qui a pris son nom. Signalons d'ailleurs que le titre Stavisky... fut imposé au metteur en scène qui continue à appeler son film Biarritz-Bonheur dans ses entretiens. Deux ans plus tard, apparaît sur les écrans Providence , film tourné en langue anglaise sur un scénario de David Mercer et qui montre les turpitudes d'un écrivain en pleine création. En 1980, Mon oncle d'Amérique remporte un vif succès populaire. Le film mêle des éléments fictionnels à des interventions filmées du professeur Henri Laborit sur le comportement humain et animal.

En 1983 débute la collaboration avec le quatuor d'acteurs :
Sabine Azéma - Fanny Ardant - André Dussollier et Pierre Arditi. La vie est un roman met en parallèle trois récits appartenant chacun à des temporalités différentes (début vingtième siècle, années 80 et temps imaginaire) qui ont pour point commun un château isolé du monde. En 1984 Resnais confie les rôles principaux de L'Amour à mort à ses quatre comédiens fétiches cités plus haut : un cinquième rôle principal est également confié à la musique de Henze : inserrée dans la fiction comme autant d'interludes, elle s'écoute pleinement sur des images de neige tombant sur un fond noir. Alain Resnais, qui a toujours accordé beaucoup d'importance à la musique de ses films, en a fait ici une véritable actrice du film. Deux ans plus tard, avec le même quatuor, il met en scène au cinéma une pièce de théâtre d'Henry Bernstein, Mélo , un de ses nombreux chefs-d'oeuvre, tourné pourtant à une vitesse fulgurante et avec très peu de moyens.

En 1989,
I want to go home, nouveau film tourné en langue anglaise, met en évidence le neuvième art, la bande dessinée, pour lequel Alain Resnais a une affection toute particulière depuis très longtemps. Pour ce faire, il a confié la rédaction du scénario à Jules Feiffer, auteur de bande dessinée américaine. Là encore, la BD joue un rôle à part entière puisque des personnages de bande dessinée font régulièrement leur apparition dans le film.

En 1993, le réalisateur, grand admirateur du dramaturge
Alan Ayckbourn (il assiste chaque année, si possible, à ses nouvelles pièces montées en Angleterre), décide d'adapter une de ses pièces au cinéma : Intimate Exchanges , qui deviendra en Français sous l'oeil cinématographique d'Alain Resnais et la plume de Jean-Pierre Bacri et Agnès Jaoui, Smoking / No Smoking, deux films jumeaux mettant en scène uniquement deux acteurs (Sabine Azéma et Pierre Arditi) pour sept personnages. Le film est construit sous forme de pieuvre, du "ou bien... ou bien..." : telle parole entraîne telle situation, telle autre en entraîne une autre. Sur les seize possibilités de récit de la pièce initiale, Resnais n'en garde "que" douze réparties en deux films : Smoking et No Smoking , que l'on peut voir dans l'ordre qu'on veut.

En 1997, la nouvelle collaboration avec Agnès Jaoui et Jean-Pierre Bacri (mais cette fois pour un scénario original) apporte un grand succès public à Alain Resnais avec
On connaît la chanson, film mettant en scène ses acteurs fétiches (Sabine Azéma, André Dussollier et Pierre Arditi) ainsi que les scénaristes qui sont eux-mêmes acteurs. Sur le thème des apparences et notamment des fausses apparences, les personnages chantent régulièrement en play-back des airs de chansons populaires, exprimant ainsi leurs sentiments et leurs états d'âme. Le "Résiste" chanté par Sabine Azéma y est d'ailleurs irrésistible et est resté dans beaucoup de mémoires de spectateurs.

En décembre 2003 sort sur les écrans une adaptation d'une opérette de
Maurice Yvain, Pas sur la bouche . Le réalisateur approche ainsi de beaucoup un rêve qu'il mûrit depuis longtemps : tourner un opéra. Ce film met une nouvelle fois en scène ses acteurs fétiches : Sabine Azéma et Pierre Arditi (en écartant cependant André Dussollier qui tournera seulement les bandes-annonces du film, sorte de compensation offerte à l'acteur), et invite de nouveaux visages dans l'univers de Resnais, bien connus dans le cinéma français comme Audrey Tautou, Isabelle Nanty ou Daniel Prévost.

Enfin, le dernier opus,
Coeurs, sorti en novembre 2006, est une nouvelle adaptation d'une pièce de théâtre d'Alan Ayckbourn intitulée Private Fears in Public Places. On y retrouve les acteurs habituels : Sabine Azema, Pierre Arditi, André Dussollier, Lambert Wilson, ainsi qu'Isabelle Carré et Laura Morante. Sous la neige parisienne, les personnages en mal d'amour se croisent, se surprennent et ne se fixent jamais véritablement quelque part. Une mise en scène brillante qui a valu le Lion d'argent de la meilleure réalisation à Alain Resnais.

Ce dernier est un cinéaste très actif et passionné par son travail. Même s'il ne tourne pas à un rythme effreiné, les projets sont nombreux et on ne peut qu'espérer qu'il en sortira encore beaucoup de sa boîte à idées.

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